(Un épisode des aventures de Yaddo
espion intergalactique)
Le premier soleil entamait
sa course oblique à travers le ciel orangé. Le deuxième se levait déjà à
l’horizon le teintant de vert.
Bientôt, la mégapole allait sortir de terre dans le bruit feutré de la gigantesque machinerie. Les formes élancées des pyramides translucides monteraient à l’assaut d’un ciel de feu.
Bientôt, la mégapole allait sortir de terre dans le bruit feutré de la gigantesque machinerie. Les formes élancées des pyramides translucides monteraient à l’assaut d’un ciel de feu.
Quelques
rares privilégiés, visiteurs importants ou membres de la gouvernance pouvaient
profiter de l’incroyable spectacle. Vêtus d’une combinaison les protégeant des
radiations particulièrement dangereuses durant le lever successif des deux
soleils, ils l’admiraient depuis leurs plate-formes réservées et s’amusaient de
leur deux ombres opposées s’allongeant sur les façades renaissant du néant.
Dès
que la cité serait entièrement émergée, et après les vérifications concernant
l’absence de nocivité de l’atmosphère diurne comme des rayonnements solaires,
les sirènes allaient donner le signal de la reprise de l’activité. Une véritable
marée humaine et galactique prendrait possession des axes magnétiques de
Luxcity1, capitale insensée de la planète 278
Les
premiers hommes arrivés là, avaient découvert une terre particulièrement
inhospitalière. Le sol rocailleux était recouvert en permanence d’une nappe de
gaz tellurique nauséabond et dès que les soleils disparaissaient, la
température diurne plutôt clémente chutait incroyablement jusqu’à atteindre des
valeurs proches du zéro absolu. Le sol gelait alors instantanément et rendait
tout établissement définitivement impossible.
Mais
la position de 278 était fort intéressante. Elle se situait à un carrefour d’un
très grand nombre de couloirs spatio-temporels et de fait, pouvait devenir une
plaque tournante essentiel au trafic cosmique. Les politiques poussés par
certaines factions militaires commandaient missions d’étude sur missions
d’étude pour arriver à trouver une solution tenable à l’occupation sinon à la
terra formation de la planète. Une équipe de chercheurs proposa alors
d’enterrer très profondément les bâtiments durant la nuit et de les faire
resurgir chaque matin. Traités de fous tout d’abord, ces brillants
scientifiques tinrent bon. On utiliserait le gaz présent partout à la surface,
et inépuisable car produit en permanence
par la planète elle-même, comme source d’énergie. Quelques siècles plus tard,
Luxcity1, devenait un passage quasi obligé pour les voyageurs interstellaires.
Tranquillement
installé dans sa bulle opaque, Yaddo attendait d’accoster sur le spatioport de
la cité. Il avait lui aussi contemplé le fascinant spectacle depuis le proche
espace, d’autant plus qu’il ne s’était pas rendu sur 278 depuis fort longtemps.
Les hommes avaient bâti de nouvelles pyramides translucides encore plus hautes,
encore plus belles. Il ne pouvait s’empêcher d’admirer l’ingéniosité et
l’intelligence de ceux qui avaient imaginé puis réaliser une telle prouesse.
L’intense luminosité des soleils multipliés à l’infini dans les reflets des
parois permettait de mieux comprendre le nom de l’étrange capitale. Le panorama
qui s’offrait à lui était d’une beauté inimaginable. La lumière irisée de la
ville au milieu d’un désert de rocs et de gaz rougeâtres, barré à l’ouest par
une chaîne de montagnes aux lueurs bleutées frappaient les nouveaux arrivants d’une
espèce de stupeur respectueuse devant tant de splendeurs. Les pyramides
montaient à l’assaut d’un ciel virant au jaune. A leur pied, l’enchevêtrement
des axes magnétiques où circulaient d’innombrables vaisseaux ou de sliders
individuels dessinaient des arabesques, ballet silencieux et presque
immatériel.
Tous
les habitants « à demeure » de Luxcity6 travaillaient soit pour les
gouvernances régionales ou planétaire, soit pour le pan gouvernement. Hors des
pyramides hôtels pour les voyageurs en transit, la presque totalité des autres
étaient partagés en deux zones : en bas les appartements, en haut les
bureaux. Une heure avant la fin du jour, c’est à dire avant la disparition du
deuxième soleil, les sirènes retentissaient. Tous regagnaient leur logement et la
lente descente dans les entrailles de la planète pouvait commencer.
Le
plus étonnant est que, studieuse, administrative, stricte et rigoureuse durant
le jour, la vie de la cité se débridait dès le couvercle d’acier refermé sur
elle. Les restaurants regorgeaient de monde, les bars ne désemplissaient pas
et, malgré les colères sporadiques des ligues de vertu, des centaines de
lupanars affichaient leurs enseignes sans vergogne et accueillaient toutes les
populations de l’univers dans des orgies démesurées.
Yaddo
savait bien entendu tout cela. Il savait aussi qu’Azaïs, la belle
Anthropo-reptilis avec qui il avait eu une aventure sur Treetown6 avait
vraisemblablement été enlevée alors qu’il croyait au contraire, être son
prisonnier. Il pensait parfois à elle, mais plus encore à Mona-Lisa, sa
compagne aux yeux orangés qu’il avait laissée lors de son départ vers ce qu’il
imaginait devoir être une banale mission sur Terra Mater.
Sa
visite sur Luxcity1, véritable creuset où se trouvaient réunies presque toutes
les races peuplant l’univers, avait pour but de chercher des informations sur
le fameux mouvement des NAM (nostalgiques des anciens mondes) dont il était sur
qu’il n’était pas étranger à la disparition d’Azaïs, pas plus qu’aux étranges
évènements qui avaient précipiter sa mission initiale.
Son
bracelet s’illumina soudain. L’autorisation de se poser venait de lui être
donné. Il eût juste le temps d’observer une tache de lumière au flanc de la
montagne bleutée. Une tâche à son avis, tout à fait incongrue. L’ordre de
dématérialisation de sa bulle clignota et il entra dans la salle d’arrivée du
spatioport pour se présenter au comptoir ou l’attendait ce brigand de Joe
Krapov le chef de la police locale et l’un de ses plus vieux amis.
La
nuit serait longue.
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